15/05/2008 MH Mobile Homme Artothèque de Pessac.France
Les Fantômes de mon présent
Michel Herreria a choisi de vivre parmi ses contemporains. Il regarde, décortique, analyse et restitue notre époque à travers des traits d’esprits aux contours fragiles et aux silhouettes passées. Il présente à l’Artothèque une sélection de dessins sur papier, réalisés à l’encre ou au feutre, issus de trois séries intitulées Les Genstrificateurs (2007-2008), Les Tristes (2006-2007) et Les Cartes à gratter (1995-2004).
Chacune des pièces déroule le fil d’une pensée agile et transversale sur notre univers, celui de la consommation et de la communication mais aussi d’un système déshumanisé. L’artiste n’est ni au-dessus, installé confortablement depuis un poste d’observation, ni à côté, au bord de la route. Il est au coeur de ce qu’il dépeint.
Quels que soient les supports - dessin, peinture, vidéo, sculpture ou animation – le plasticien développe le même vocabulaire pictural, utilise le même alphabet pour creuser dans une langue dégénérée qu’il invente. Enveloppes humaines, espaces machines, meubles antropomorphes et jeux de mots constituent son bestiaire lexical. Cet univers aux apparences flétries restitue la vision onirique et désenchantée d’un monde où l’homme est aliéné. Les points de vue politiques d’Herreria empruntent formellement aussi bien au rêve qu’au cauchemar et ressemblent à des hallucinations. Additionnées, elles écrivent une chronique sombre, spiralée, sur les mécanismes sociétaux contemporains et par extension sur « la tyrannie de la communication » (1). Elles dépeignent l’hégémonie du système, mais trouvent la force de résister aux coups assénés par le moindre de ses revers. Les corps crayonnés, évidés, renvoient à une world culture de la communication, dénonçant l’enfermement comme le paradoxe d’une mise en réseau expansive de l’homme et de son repli sur lui-même.
Texte Cyril Verges et Cécile Broca Spirit N° 40 Mai 2008